11 février 2013
14h02.
A quelques minutes près, il y a deux ans le ciel me tombait sur la tête. Avec une violence émotionnelle inouïe.
Flashback.
La veille, c'était un dimanche, je devais partir pour la journée chez mes parents, pour fêter les soixante-neuf ans de mon père. Je n'avais pas envie d'y aller, non par caprice, mais parce que je traînais une sinusite qui me tapait dans la tête ainsi qu'une méchante bronchite depuis trois semaines, qui m'épuisaient. J'avais continué à aller vaillamment travailler, les cris de enfants accentuant mon mal de tête, et je n'en pouvais plus. En plus il faisait un sale temps : de la pluie, de la pluie, de la pluie. Le samedi soir j'avais prévenu ma mère que je ne viendrai peut-être pas, mais arrivée au dimanche matin, je me forçai à me préparer, pour mon père, qui aime tant avoir ses enfants autour de lui pour fêter les ans qui passent.
Mon chat, Sacha, était sorti vers 4h00 du matin, pour rentrer vers 9h00. Il mangea un peu, joua avec un grosse boule de papier que je lui avais confectionnée depuis peu, et alla se coucher dans la chambre de ma fille, lieu qu'elle lui interdisait quand elle était là, mais elle n'était pas là, le chat en profitait.
Traînant les pieds, je me préparai, et avant de partir, allai à la porte de la chambre dire "Je reviens ce soir mon Sacha". Il était couché, roulé en boule sur la couette chaude et confortable, calé contre des coussins. Ne releva pas la tête. Nous étions dans la routine.
Quand je rentrai le soir, j'étais encore plus épuisée. Au radar. Je ne m'inquiétai pas de ne pas voir mon chat se lever pour m'accueillir, ni qu'il ne vienne pas manger. Ni de le voir toujours couché au même endroit de la même manière. Je ne rentrai même pas dans la chambre pour aller le caresser. J'étais tellement mal physiquement que je n'y ai même pas pensé.
Le lendemain matin, à la bourre pour partir au travail, je ne m'inquiétai pas non plus. Routine. Mais avec le recul, je me dis que je n'étais vraiment pas dans un état normal, que si je n'avais pas été aussi épuisée, dès le dimanche soir je serais allée voir mon chat dans la chambre de ma fille.
C'est ma fille qui le trouva, de retour de week-end.
Toute innocente que j'étais, je lui avais laissé un mot : "Sacha aime vraiment beaucoup ton lit !!!".
Ce fut un choc pour elle.
Elle essaya de me téléphoner, mais je ne vis son appel qu'en sortant du travail. Elle appela son copain, puis mes parents, ce qui lui fit du bien. Pouvoir parler, se décharger. Quand j'y repense, j'aurais préféré lui éviter ce choc...
A mon retour du travail, mon monde s'effondra.
Je ne pouvais concevoir que mon chat fût mort : il allait bien, il avait même joué le dimanche matin. Ce n'était pas possible et pourtant, passé le premier moment d'émotion, difficile à soutenir, je me rendis à l'évidence : Sacha était roulé en boule, comme s'il dormait, à la même place que le dimanche matin mais il n'y avait plus de vie en lui.
Ma fille avait pensé le déplacer de sa chambre, mais avait dû y renoncer. Je lui dis qu'elle avait bien fait : il me fallait le voir là où il était quand la vie l'a quitté, c'était important pour moi. Tout aussi important, et encore plus : c'était à moi et personne d'autre d'accomplir les derniers gestes pour lui. Passer mes mains sous lui, tellement lourd et dur de non-vie, pour le poser dans une serviette choisie pour lui, le déposer dans un carton, le soulever, l'emporter dans l'entrée en attendant l'arrivée de mon père, qui viendrait le chercher pour l'enterrer près de mes autres chats. Plus tard, reprendre le carton pour le porter jusqu'à la voiture de mon père.
Cette mort soudaine me remua énormément. Je mis du temps à m'en remettre. La petite Dune, chatonne d'à peine un mois quand je la recueillis chez moi (voir "l'histoire d'une famille chat"), y contribua pour beaucoup. Ma fille m'aida aussi, beaucoup de paroles entre nous.
Il est cependant deux choses que j'appréciai (si je peux dire) dans cette épreuve, c'est que mon chat était mort chez moi, au chaud sur la couette de ma fille, installé confortablement, et non pas dehors, dans la pluie et le vent froid de février. Il s'en est fallu de peu. C'est aussi qu'il est mort paisiblement, apparemment sans souffrance.
PS : j'ai commencé à écrire en début d'après-midi mais n'ai pu finir que ce soir.